Gutai, l’espace et le temps

Gutai, l’espace et le temps : Ohara Kaikan. Shimamoto Shôzô créant une peinture en lançant des bouteilles en verre de peinture contre une toile à la deuxième exposition d’art Gutai.  17 novembre 1956, photographie.    Gutai, l’espace et le temps : Matsutani Takesada.  Sakuhin.  1965, vinyle acrylique, huile sur toile et carton, 182 x 142 cm. Hyôgo Prefectural Museum of Art, Kôbe.    Gutai, l’espace et le temps : Murakami Saburo.  Passage, 8 novembre 1994 (Traversant les écrans de papier). 1994, bois, papier kraft, poudre d’or, 240 x 240 cm. Centre Pompidou – Musée national d’art moderne, Paris.    


L'exposition


Il suffit pour s’en convaincre, sinon de dresser l’inventaire des gestes fondateurs de certains artistes de Gutai, du moins d’en rappeler quelques-uns qui en ponctuent l’histoire de façon indélébile. En s’élançant dans le vide, tenu par une corde, en projetant de la peinture sur sa toile et en se servant de ses pieds comme spatule ou pinceau pour l’étaler, Kazuo Shiraga outrepasse la rigueur chorégraphique de Pollock, mettant son corps lui-même en jeu dans la réalisation de l’œuvre. Quand Yoshida Toshio utilise le feu pour provoquer la surface picturale et créer un motif, il précède Yves Klein et ses expérimentations avec Gaz de France. Quand Tanaka Atsuko organise des installations avec des sonnettes ou encore quand il crée un costume fait d’ampoules clignotantes suivant le sens de circulation du sang humain, il vise à solliciter certains de nos sens de façon inédite, élargissant par là le champ ordinairement restreint de nos habitudes perceptives. Enfin, quand Seiichi Sato s’enferme lui-même dans un sac suspendu à un arbre en tant que sculpture vivante, il est difficile de ne pas penser aux performances extrêmes que réaliseront les artistes du body art.
De cette incroyable aventure du Gutai, le musée Soulages à Rodez – qui a signé une collaboration avec celui de Kobe, dépendant de la préfecture du Hyogo, province jumelée au département de l’Aveyron – présente une exposition de tout premier plan qui sied parfaitement au contexte et dont les œuvres partagent nombre d’enjeux esthétiques avec celles de leur hôte. C’est dire la pertinence de la programmation établie par Benoît Decron, le maître de céans, dont le mérite est non seulement d’avoir obtenu le prêt d’une vingtaine de peintures exemplaires mais de les avoir savamment mises en scène.

Extrait de l'article de Philippe Piguet, publié dans le N°85 de la revue Art Absolument.
Parution le 19 septembre 2018

Quand


07/07/2018 - 04/11/2018


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